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Élisabeth et Félix Leseur : l’amour comprend tout


L’amour des époux se décline en mille exemples. Il est athée, elle est fervente catholique : le couple Leseur, marié en 1889, est un témoignage de foi et de charité particulièrement émouvant.

Comment vivre en couple lorsqu’un conjoint est croyant et l’autre non ? A cette question complexe, le témoignage d’Élisabeth et Félix Leseur répond par la force de l’amour, celui qui comprend tout et pardonne tout. Dans Élisabeth et Félix Leseur, Itinéraire spirituel d’un couple, récemment paru aux éditions Artège, Bernadette Chovelon raconte l’histoire de ces deux intellectuels parisiens aux environs de 1900, épris l’un de l’autre et pourtant bien différents.

Félix est un athée anticlérical qui considère la religion comme la pire ineptie. Élisabeth, bien que perdant la pratique religieuse les premières années de leur mariage, la retrouve en lisant les livres de d’Ernest Renan le positiviste ; elle constate la faiblesse de ses arguments.

Commence alors pour elle un long chemin, dont elle raconte dans son Journal la vie spirituelle intense et la tristesse de voir Félix si rationaliste. Elle choisit de ne pas polémiquer avec lui, sachant combien l’amour-propre peut fausser de telles conversations. Elle n’en demeure pas moins très amoureuse de son mari, avec qui elle sort et voyage beaucoup. En raison de la fragile santé d’Élisabeth, ils ne pourront avoir d’enfant.

Leur relation est particulièrement fusionnelle, comme en témoignent leurs lettres : « Quelle triste journée j’ai passé hier, mon bien-aimé, écrit Élisabeth retirée dans leur maison de campagne dans le Jura, car ta lettre d’avant-hier ne m’est arrivée que ce matin en même temps que celle d’hier. Deux journées non seulement sans te voir, mais sans posséder ce tout petit écho de toi qu’eût été une lettre. » Tandis que Félix lui écrit un autre jour, quelques heures après l’avoir laissée dans cette maison : « Je commence mon voyage en t’embrassant au buffet de Pontarlier, le plus tendrement que je puis. Il me semble que tout à l’heure je ne l’ai pas assez fait. »

Malgré le passage des années, et son admiration devant le courage d’Élisabeth face à la maladie, Félix reste hermétique à toute évolution spirituelle. Sa femme garde espoir, prie pour lui et prédit même qu’il deviendra moine. Il hausse les épaules, incrédule. Après la mort d’Élisabeth en mai 1914, effondré, il se penche sur le journal et les lettres de son épouse.

L’émotion le saisit en découvrant les pensées de celles-ci, sa relation intime avec le Christ, les souffrances qu’il lui a involontairement causées par son mépris de la religion, l’amour et le respect qu’elle avait pour lui. Il comprend le choix de sa femme, qui écrivait : « Ne croyons pas hâter auprès des âmes la venue du règne de Dieu par notre action personnelle. Tant que l’heure divine n’aura pas sonné, nos efforts seront vains, ou plutôt ils ne seront qu’une active prière, un appel à celui qui transforme et sauve. »

Et cette ultime transformation a lieu, puisque le veuf vit désormais avec l’invisible présence de sa femme à ses côtés. Il se laisse peu à peu toucher par la grâce divine et fait le choix de devenir père domincain. Il fait connaître la grande richesse spirituelle de son épouse et va même jusqu’à préparer le dossier de sa cause de béatification. Il meurt, en 1950, avant d’avoir pu le terminer. L'extraordinaire fécondité spirituelle du couple a trouvé sa source dans leur amour conjugal, qui lui-même venait de Dieu. • Solange Pinilla

Article paru dans Zélie n°2 (octobre 2015)​

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