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Léonie Martin ou la faiblesse sanctifiée


Alors que l’Eglise a déclaré saints Thérèse Martin en 1925 et ses parents Louis et Zélie en octobre 2015, Léonie, la troisième fille, a vu son procès de béatification s’ouvrir en juillet 2015. Rien ne prédisposait pourtant cette « enfant terrible » de la famille à être portée sur les autels, comme on le constate dans la biographie du Père Stéphane-Joseph Piat, parue en 1966 et rééditée récemment par les éditions Emmanuel, Léonie Martin. La sainteté inattendue d’une sœur de Thérèse.

Léonie naît en 1863 à Alençon. C’est la troisième enfant de Louis et Zélie, après Marie et Pauline. Suivront Céline et la « petite » Thérèse, ainsi que quatre enfants morts très jeunes, dont Hélène, à l’âge de 5 ans, et qui était la compagne de jeux de Léonie... Outre sa santé fragile, Léonie inquiète sa mère, car sa lenteur à comprendre et son comportement rebelle lui donnent du fil à retordre.

Zélie tente à deux reprises de l’envoyer auprès de sa sœur, Sœur Marie-Dosithée, à la Visitation au Mans, où étudient déjà Marie et Pauline. Hélas, les deux essais échouent car Léonie est trop turbulente. Elle a cependant une grande admiration pour sa tante et rêve de devenir religieuse comme elle.

Quand Léonie a 13 ans, sa mère apprend que Louise Marais, la servante, terrorise Léonie depuis deux ans tout en étant persuadée d’assouplir le caractère de l’adolescente. Zélie, qui a appris son cancer du sein, demande à Louise de ne plus parler à Léonie et de quitter à la maison lorsqu’elle mourra de son cancer. La maman écrit : « S’il ne fallait que le sacrifice de ma vie pour que [Léonie] devienne une sainte, je le ferais de bon cœur. »

Quand Zélie naît au Ciel en 1877, la famille déménage à Lisieux aux « Buissonnets », près de leur oncle et tante Guérin. Léonie devient pensionnaire chez des bénédictines. A 23 ans, elle devient postulante chez les clarisses, à la surprise de sa famille. Elle en sort deux mois plus tard.

L’année suivante, Léonie entre à la Visitation de Caen. L’attitude stricte et austère de la directrice du noviciat, ainsi que les locaux vétustes, ne l’aident pas à s’y épanouir. Elle en repart au bout de six mois, bien que convaincue que sa vocation est là.

C’est alors que sa petite sœur Thérèse entre au Carmel de Lisieux. Léonie entretient avec celle qui est sa filleule de confirmation une relation pleine d’affection. Leur correspondance permet de voir qu'elles se soutiennent mutuellement et combien Thérèse croit en la vocation de sa sœur.

Après cinq années, Léonie tente une nouvelle fois d’entrer à la Visitation à Caen. Hélas ! Nouvelle sortie au bout de deux ans, entre autres à cause de ses soucis de santé et du rigorisme de la supérieure. En 1897, Thérèse meurt en odeur de sainteté.

Enfin, en janvier 1899, à l’âge de 35 ans, Léonie entre définitivement à la Visitation, qui est en plein renouveau. Elle devient sœur Françoise-Thérèse - Françoise en référence à saint François de Sales, le cofondateur avec sainte Jeanne de Chantal de l’ordre de la Visitation. Léonie continue à grandir en humilité et en simplicité.

Sa vie religieuse est marquée par les étapes qui vont mener sa petite sœur à devenir sainte Thérèse de Lisieux en 1925 : des témoignages pour l’enquête ecclésiastique, et notamment une visite au Carmel de Lisieux où Léonie retrouve ses trois sœurs carmélites. Il s'agit de Marie, Pauline et Céline devenues respectivement Sœur Marie du Sacré-Cœur, Mère Agnès de Jésus et Sœur Geneviève de la Sainte Face, avec qui elle entretient une correspondance nourrie. La voie d’enfance spirituelle tracée par la petite Thérèse habite le cœur de Léonie et elle comprend que sa faiblesse est le lieu par excellence de la Miséricorde divine, et qu’il faut à ce titre aimer ses imperfections.

Après de nombreuses souffrances physiques et des moments d’aridité spirituelle, Léonie meurt dans la paix en 1941, entourée par les sœurs du monastère.

En janvier 2017, Léonie, désormais « Servante de Dieu », est transférée dans un nouveau tombeau à la chapelle du monastère de la Visitation à Caen. Son chemin sinueux – qui lui valut d’être renvoyée deux fois de pensionnat et de repartir trois fois du monastère – montre combien la valeur de la vie n’est pas de l’ordre de la performance, mais bien de l’amour. • S.P.



Crédit photo © Archives du Carmel de Lisieux

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