Faire vivre une malouinière
Depuis quinze ans, Sophie et son mari Benoît tiennent des chambres d’hôtes au manoir de la Baronnie, une bâtisse du XVIIe siècle en Bretagne. Reportage.
Depuis la départementale, on ne distingue qu’à peine derrière les arbres le manoir de la Baronnie : ce qui fut la maison de campagne d’un armateur malouin se trouve aujourd’hui entourée d’habitations. Par une petite rue au nom poétique, le chemin des Hauts murs, nous arrivons dans le parc de cette malouinière, sous un ciel nuageux.
Dans un salon chaleureux, où flânent un chat et un chien, Sophie Laude nous raconte l’aventure de la Baronnie : « Mon mari et moi sommes amoureux de vieilles pierres et nous avons mené plusieurs projets, depuis 24 ans que nous sommes mariés. En 1999, alors que mon mari ne supportait plus la région parisienne, nous avons racheté un hôtel à Dinard. En 2004, nous avons choisi d’acquérir cette maison avec un projet de chambres d’hôtes, qui permet un accueil plus personnel que l’hôtel. »
A cette époque, tout est à refaire dans la malouinière : une moquette murale tapisse les murs, des carrelages roses recouvrent le carrelage d’origine, le jardin est à l’abandon… « Cela fait quinze ans que nous restaurons le manoir à la mesure de nos moyens. C’est un peu notre bébé ! Nous voulons préserver ce patrimoine. »
La malouinière, dont on a pu identifier l’existence en 1667, avait été rachetée par de nombreux propriétaires et était notamment devenue une colonie de vacances. Elle est donc propice aux découvertes : « Avec un détecteur de métaux, j’ai retrouvé un napoléon en argent dans le jardin et un quart américain dans la fontaine ; le manoir avait été réquisitionné par les Américains pendant la Seconde guerre mondiale ».
La Baronnie fait 600 m² – dont les trois quarts sont dédiés aux hôtes – et compte 7000 m² de terrain. « Entretenir cette maison est un travail à plein temps : quand cela est fini d’un côté, il faut recommencer de l’autre ! C’est une passion, et surtout une chance d’y habiter. » Habiter ici a aussi du sens pour eux car Benoît est descendant de Surcouf, célèbre corsaire malouin.
En plus des cinq chambres d’hôtes, Sophie et Benoît ont installé deux roulottes, un gîte, un spa et une piscine. Un de leur trois enfants est salarié et a créé un escape game dans une petite dépendance du manoir, il y a deux ans. Il s’agit d’un jeu grandeur nature, nommé « Le dernier secret de Surcouf », où 2 à 6 joueurs sont enfermés dans une pièce et ont une heure pour résoudre des énigmes et s’en échapper.
Heureux de vivre dans une maison historique et de transmettre cette passion à leurs hôtes, Sophie et Benoît n’ignorent pas les contraintes d’une telle responsabilité. C’est une demeure lourde de charges et d’entretien. Une femme des ménage les aide, notamment pour les chambres des hôtes. La malouinière n’a pas de chauffage, donc l’hiver, il faut compter sur les pulls et les feux de cheminée. Récemment, le couple a remplacé onze fenêtres et porte-fenêtres : « Le manoir n’est pas classé monument historique, mais nous avons souhaité refaire des fenêtres à l’ancienne, en chêne et avec crémaillère ».
Travaillant ensemble 24 heures sur 24, Sophie et son mari ressentent le besoin de prendre des vacances sans leur conjoint, ce qui n’empêche pas d’en prendre également à deux, en décembre. Même en congés, il se connectent sur leur ordinateur une fois par jour pour gérer les réservations. Le prochain projet des propriétaires de la Baronnie ? Participer aux prochaines Journées du patrimoine, qui auront lieu le 21 et 22 septembre 2019.
Sophie nous quitte : elle doit aller aider la femme de ménage à nettoyer les chambres des hôtes... Dans une telle demeure, l’occupation ne manque jamais ! Solange Pinilla
Lire le reste de Zélie n°43 - Juillet-Août 2019
Crédit photo : S. Pinilla