Le prénom, un choix qui a du sens
Nombre de naissances avec le prénom Zélie en France entre 1929 et 2019. Source : https://dataaddict.fr/prenoms/#zélie-f-f (chiffres Insee).
Si opter pour le prénom de son enfant peut faire l’objet d’une longue réflexion, il est intéressant de revenir sur celui que nos parents nous ont donné, avec ses composantes familiales, historiques, culturelles et religieuses.
« Le prénom remplit plusieurs rôles : celui d’identification, de filiation, et de projet », expliquent la psychothérapeute Constance Lanxade et la journaliste Elena Bizzotto dans Un prénom, le choix d’une vie (éditions Horay). Donner un prénom n’est pas anodin, comme on le voit dans la Bible avec Abraham et Sarah qui en reçoivent un nouveau de la part de Dieu.
En France, les prénoms sont d’origines diverses : latine (Diane, Marius), grecque (Sophie, Philippe), celtique (Morgane, Arthur), germanique (Adèle, Louis) ou encore hébraïque (Élisabeth, Raphaël). Et le vôtre ?
En 1803, Napoléon demande que les prénoms soient choisis uniquement dans le calendrier liturgique et l’histoire ancienne, loi qui a perduré jusqu’en 1993. Du côté de l’Église catholique, depuis le concile de Trente achevé en 1563 jusqu’au concile Vatican II en 1962, il a été souhaité qu’on ne donne que des prénoms de saints reconnus par l’Église.
Outre l’inscription dans une tradition géographique et religieuse, le prénom est également un marqueur psychologique et social. En effet, l’enfant s’approprie son prénom et construit son « je » avec ce dernier. Dès 4 à 6 mois, il tourne son regard lorsqu’on l’appelle par celui-ci.
« L’enfant sera sensible aux affects que les mots dégagent, lorsqu’ils sont prononcés par son entourage : retenue, importance, grandeur, étrangeté, ridicule, etc. » Les prénoms qui se prêtent aux jeux de mots par les camarades ou font référence à des héros de dessin animé ou de stars peuvent amener l’enfant à ne plus aimer son prénom.
Autre conséquence pour son identité : quand l’enfant prend le prénom de son père ou de sa mère ; dans les pays anglo-saxons, 22 % des garçons portent le prénom de leur père avec la mention (Jr). « Des études ont montré que ces Junior rencontrent des difficultés à se différencier de leur père, expliquent Constance Lanxade et Elena Bizzotto. Ils ressentent une pression à l’excellence qui peut être très mal vécue. En cause, les parents qui peuvent rejeter leurs frustrations sur cet enfant miroir. Il s’agirait même d’un facteur de prédisposition à la maltraitance outre-Atlantique. Les Junior seraient en plus grand nombre en hôpital psychiatrique ou en état de délinquance. »
Certains parents peuvent choisir des prénoms très originaux afin de montrer combien leur enfant est unique. Cependant, devoir répéter plusieurs fois son prénom pour qu’il soit bien compris ou l’épeler systématiquement peut être une expérience pénible. Par ailleurs, il a été observé que « nous convoquons plus facilement des préjugés sur des personnes portant des prénoms rares comme Oscar ou Corysande, que sur des personnes portant des prénoms classiques comme Pierre ou Marie. Les prénoms communs inspirent plus de tolérance, de sympathie, de courage ». Néanmoins, un prénom peu commun peut aussi donner un sentiment de fierté et celui d’être unique.
Si une personne s’approprie le plus souvent son prénom, questionner ce dernier permet de mieux le comprendre, et parfois de découvrir les motivations inconscientes qui ont présidé à ce choix : nous met-il en lien avec des personnages célèbres, des personnes de notre famille, avec une tradition culturelle ou à un saint en particulier ?
Il peut arriver que le prénom soit le miroir d’attentes, d’inachevés, de dettes laissées en instance de nos parents et de notre famille. On peut voir cela par rapport à un ancêtre, ou quand l’enfant porte le prénom d’une personne décédée peu avant sa propre naissance, ou encore le nom qui aurait été donné à un enfant mort in utero auparavant. « Exister par soi-même et pour soi-même avec nos propres projets demande de nous affronter à ces projets familiaux pour devenir sujet de sa vie et non objet du désir des autres », soulignent les auteurs.
Une autre façon d’écouter ce que nous dit notre prénom est d’utiliser la « langue des oiseaux », c’est-à-dire de jouer avec les lettres et sonorités. Par exemple, les lettres du prénom Marie peuvent écrire « aimer » ; le prénom Léon peut écrire « Noël » ; dans Jean, on entend « ange », et dans François, « sois franc »... Cela peut aider à trouver une signification à son prénom.
Dès lors, comment choisir un prénom pour son enfant ? Il s’agit bien sûr d’un choix de couple. S’intéresser à l’origine et la signification étymologique du prénom est intéressant. On est parfois tenté par un registre de prénoms particulier : biblique (Madeleine, Samson), marin (Dauphine, Titouan), romantique (Angélique, Rodrigue), rétro (Hortense, Georges)... Si l’on craint que son enfant porte un prénom qui risque d’être partagé par de nombreux autres enfants, le site dataaddict.fr/prenoms informe sur la courbe de popularité des prénoms donnés entre 1945 et 2015.
Dans tous les cas, mieux vaut faire résonner le prénom envisagé avec le nom de famille, pour que la sonorité des deux soit harmonieuse. « Si le nom de famille est long, il se mariera bien avec un prénom court, et inversement », affirment les auteurs du Prénom, le choix d’une vie. Quand le nom de famille commence par une consonne, on conseille de choisir un prénom qui se termine phonétiquement par une voyelle ; et vice versa.
Quant aux deuxième et troisième prénoms (ou davantage), dont l’objectif pratique est d’éviter les homonymes, la tradition française invite à faire référence au parrain, à la marraine ou bien aux grands-parents. « Les parents peuvent y placer les prénoms qui plaisaient beaucoup au moment du choix, mais qui n’étaient pas adaptés à la première place. »
Bien sûr, en tant que chrétiens, le saint Patron joue un rôle important dans le choix du prénom. C’est ainsi qu’on a vu apparaître de nouveaux prénoms inspirés de noms de de famille de saints ou de bienheureux : Vianney, Bosco ou Foucauld, ou même le prénom polonais de saint Jean-Paul II, Karol. Même lorsque son prénom n’est pas celui d’un saint, l’enfant peut néanmoins avoir un Patron : par exemple, églantine peut être sous le patronage de sainte Fleur ou de sainte Rose de Lima.
Donner un saint Patron à son enfant, et le célébrer le jour de sa fête, c’est l’inviter sur le chemin de la sainteté. Prier lorsque l’on cherche le prénom de son enfant est donc tout aussi cohérent (voir ci-dessous). Solange Pinilla
Prière pour trouver le prénom de notre enfant
« Esprit Saint,
Donne-nous la grâce de choisir
dans la paix et la joie
le prénom de notre bébé.
Toi qui connais notre enfant
mieux que nous-mêmes,
inspire-nous un prénom qui lui corresponde.
Souffle dans notre prière
et dans notre vie quotidienne !
Que nous puissions tomber d’accord
et nous réjouir de notre trouvaille,
et que notre enfant soit heureux
de porter ce prénom toute sa vie.
Sois béni, Seigneur,
de nous appeler chacun par notre nom.
Merci pour le saint patron (la sainte patronne)
qui veillera sur notre enfant du haut des cieux.
Qu’il (elle) puisse l’accompagner
jusqu’à toi et lui donner envie d’être saint(e) ! »
Prière tirée des Méditations au fil de ma grossesse d’Adeline Nalzaro, illustrations intérieures Pauline Albrieux (Mame).
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