Valérie Micheaux, peintre décoratrice : « Le grand patron, c’est Dieu ! »
Au départ, le talent artistique de Valérie a été en partie enfoui. Même si elle a toujours créé avec ses mains, elle est devenue professeur agrégé de sciences naturelles. « C’est lors d’un stage de fresque à la chaux, l’année où j’ai eu un enfant, que je me suis reconnectée à ma créativité. J’ai eu le sentiment interne que c’est cela que j’aimais faire. »
Lors d’un stage avec un peintre en décor, ce talent caché se confirme : « Je savais intuitivement quelles couleurs il fallait mélanger. J’ai choisi de me former à l’École de peinture en décor d’Avignon, en spécialisation patrimoine. J’aime la patine ; on apprend beaucoup en regardant ce qu’ont fait les peintres précédents. »
Artiste créant des décors sur mesure, Valérie Micheaux a lancé son entreprise « Il était un mur » et travaille surtout pour des particuliers qui ont « un intérieur auquel ils veulent donner de la personnalité ». L’Avignonnaise utilise des recettes traditionnelles de peinture qui donnent un rendu authentique, grâce à des pigments naturels tels que les ocres, la terre de Sienne ou la terre d’ombre, mélangés à de la chaux, de la caséine ou encore de la colle de peau de lapin - cette dernière servant à coller des pigments sur le mur ou sur des boiseries.
L’artiste réalise également des papiers peints qu’elle décore à la main (photo), dans la tradition des papiers peints ancestraux de la Chine : « Non seulement on peut les emmener avec soi si on déménage, mais ils offrent une ambiance différente ».
La peinture ancienne est une source d’inspiration constante pour l’artiste. « Avec la généralisation des pots de peinture dans les années 1950, le métier de peintre décorateur s’est un peu perdu, explique-t-elle. C’était le dernier intervenant dans la décoration intérieure ou extérieure d’une demeure. » Le choix de ce qui sera peint se fait en fonction de la lumière, du décor de la pièce et de son usage. « Déjà, les fresques de Pompéi prenaient en compte le découpage du mur ! On ne peint pas un mur comme on colle un sticker : les proportions vont être complémentaires avec celles choisies par l’architecte. »
« J’aime voir l’émerveillement dans les yeux de mes clients, raconte Valérie. Récemment, j’ai restauré une cage d’escalier avec un décor de faux marbre, dans des tons gris clair et corail, à côté d’un sol en petits carreaux ivoire et blanc. Le propriétaire m’a dit ensuite : "C’était tellement amoché avant ; là, la vie est revenue." Je vois dans ce travail un parallèle avec celui dans notre intériorité propre. »
Valérie, qui est maintenant aussi art-thérapeute, propose à la vente depuis quelques mois des kits de peinture, les kits Simplice : « Je mets à disposition une sélection de motifs à peindre, le matériel et les pigments naturels, fabriqués en France, et une vidéo explicative. Il s’agit de la peinture a tempera, avec de l’œuf, qui permet des irrégularités naturelles et est très résistante. Peindre avec ces kits est aussi une manière de prendre du temps pour soi ». Deux euros de chaque vente sont reversés à Amado, une association de Carpentras qui aide les femmes enceintes en difficulté.
Pour Valérie, la beauté est « quelque chose qu’on sent intuitivement, qui est inscrit dans le cœur de l’homme. » Elle cite René Char : « Dans nos ténèbres, il n’y a pas une place pour la beauté. Toute la place est pour la beauté. » « Si l’on se sent fatiguée, déprimée, la beauté va nous sortir de notre torpeur, par exemple en entendant un chant à la messe, ou en voyant l’extraordinaire perfection de la nature, évoque-t-elle. Dieu nous parle à travers la beauté ! »
L’art pousse ainsi l’homme à créer de la beauté, à dire ce qui le touche. « Être à l’image de Dieu, c’est être aussi créateur, c’est collaborer avec Lui ; nous sommes toujours un peu des imitateurs. »
Quand Valérie restaure le décor d’une église – elle répond en effet à des appels d’offres de mairies ayant des biens patrimoniaux –, elle « honore Dieu par les gestes ». Après avoir travaillé dans une église des Alpes-de-Haute-Provence, l’inauguration a été un moment intense : « Une messe a eu lieu dans l’église illuminée par des cierges. C’était le sommet de cet événement, bien au-delà du fait de couper le ruban avec le maire ! »
Et de conclure : « Quand on est artiste, le grand patron, c’est Dieu ! C’est lui qui pourvoit, qui vient bénir le travail de nos mains. » Solange Pinilla
Crédits photos : © Claire Zombas - © Il était un mur
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